Le lobby du sucre et la spéculation

Cette enquête dévoile les mensonges de l’industrie sucrière et les recours possibles pour enrayer l’épidémie. Quarante ans durant, l’Association américaine du sucre et ses homologues d’autres continents ont réussi à faire prospérer un empire lourd de plusieurs milliards et à transformer les habitudes alimentaires à l’échelle planétaire.

Le lobby du sucre est désormais au banc des accusés. Ces manœuvres rappellent celles de l’industrie du tabac pour retarder coûte que coûte l’application des décisions politiques […]

La problématique de la santé publique face au lobby du sucre 

Face à ces Lobbies aux moyens financiers colossaux et aux techniques de manipulation rodées, les organismes de santé publique doivent plus que jamais multiplier les initiatives à l’instar de la France dans le cadre du Plan national nutrition santé .

Même si l’OMS résiste plutôt bien au lobby du sucre, n’en reste pas moins que qu’elle recommande de ramener l’apport en sucres libres à moins de 10% de la ration énergétique totale chez l’adulte et l’enfant. Il serait encore meilleur pour la santé de réduire l’apport en sucres à moins de 5% de la ration énergétique totale, soit à 25 grammes environ par jour afin de lutter contre le fléau de la surconsommation de sucre.

Ce décryptage de l’encerclement cognitif du lobby sucrier montre sa capacité d’influence sur les priorités de recherches relatives à la santé publique avec pour conséquence des décisions qui font passer les intérêts des firmes avant l’intérêt général.

[EGE – Ecole de Guerre Economique/Infoguerre 26 juin 2019]

Les techniques secrètes du lobby du sucre pour nous gaver

Le « père du Nutri-Score », le scientifique Serge Hercberg, a le cuir tanné. Mais depuis qu’ont commencé les discussions visant à le rendre obligatoire en 2023 dans toute l’Europe, « je suis confronté à de nombreuses insultes et menaces de mort via les réseaux sociaux, exprimées sous couvert de l’anonymat, témoigne le scientifique. Et certains hommes politiques italiens reprennent aussi les arguments du lobby agroalimentaire ».

Un lobby dans lequel on retrouve Coca-Cola, Mars, Mondelez (Milka, Côte d’or…), Lactalis, Kraft (Heinz, Capri Sun…), Ferrero (Nutella, Kinder, Tic Tac…), etc. « Ils savent que leurs produits très sucrés seront pénalisés par le Nutri-Score », insiste Serge Hercberg.

Pour lui faire barrage, ces industriels s’appuient sur des eurodéputés et des députés italiens très conciliants, comme Paolo De Castro, qui a failli devenir le président de Ferrero.

Le Nutri-Score vilipendé pour éviter un mauvais classement

L’un de leurs arguments massue ? Le Nutri-Score serait « basé sur un algorithme incorrect qui évalue mal les propriétés nutritionnelles… » Mais ils oublient de dire qu’un nouvel algorithme change la donne. La notation des graisses, telles que l’huile d’olive et d’autres huiles végétales, a été améliorée, tenant compte de leur composition.

Des scientifiques payés pour faire accuser le gras

Mais les preuves scientifiques sur les risques liés à la consommation de sucre s’accumulent. Alors l’une des stratégies des organisations pro-sucre consiste à accuser le voisin. Ainsi, le grand responsable des maladies cardio-vasculaires et de l’obésité ne serait pas le sucre mais le gras.
En 1965, trois chercheurs de Harvard publient ce résultat retentissant, dans la prestigieuse revue médicale New England Journal of Medicine.

Les consommateurs demandent des produits de moins en moins dosés en sucre. Alors, pour être en phase avec eux, les industriels insistent sur leur bonne volonté. « Ils ont inventé le concept des chartes d’engagement volontaire », explique le député Loïc Prudhomme, qui a présidé une commission d’enquête parlementaire sur l’alimentation industrielle.

Un lobbying très actif auprès des parlementaires

Le lobby du sucre repose sur des organisations, un discours mais aussi des techniques bien rodées. Les traditionnelles pressions ou accointances avec des politiques n’ont pas cessé. En France, les trois grandes entreprises sucrières – Tereos, Cristal Union et Saint Louis Sucre – ont leurs entrées à l’Assemblée nationale. La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique nous apprend qu’en 2021, elles ont dépensé entre 275 000 et 425 000 € pour faire passer leurs messages pro-sucre.

Des influenceurs pour redorer leur image

Autre méthode qui a fait ses preuves : « acheter » des scientifiques. Et, comme l’explique Stéphane Horel, dans son livre Lobbytomie, l’effet est mesurable : les études sur les boissons sucrées financées par l’industrie ont « cinq fois moins de chances que celles réalisées grâce à des fonds provenant de sources non commerciales de rapporter une association entre consommation et prise de poids et obésité ».

[60 Millions – Les techniques secrètes du lobby du sucre pour nous gaver – 08/12/2022]

Le sucre, vecteur de spéculation

Scènes du film Le Sucre – 1978 – de Jacques Rouffio, avec Michel Piccoli, Jean Carmet, Gérard Depardieu, Roger Hanin – d’après le livre de Georges Conchon (une affaire d’escroquerie, sur la base de bulle spéculative en 1974 sur le prix du sucre)

Vidéo rajoutée à l’article publié le 14-08-2009 sur le

Blog de Krys Ratgemini : « nouvelle flambée des prix du sucre : simple réplique sismique? »

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